3. PRELIMINAIRES

3.

PRELIMINAIRES

Il est jeune, tellement jeune et affiche beaucoup d’assurance. Pas très grand, il est mince et fin. Un compromis entre l’adolescence et l’âge adulte. Avec cela, un évident contrôle de lui-même. Il est à la terrasse comme convenu et pose sur elle des yeux bruns inquisiteurs quand elle avance vers lui et s’assoit. Ils s’observent brièvement. Elle parle à mi-voix, comme souvent.

- Bonjour.

Il la salue et objecte immédiatement.

- Tu as dix minutes de retard.

Elle fronce les sourcils. Il fait nuit, il pleut, elle connaît mal cette ville et puis elle est nouée. Elle a un peu de retard, c’est vrai mais les dix minutes n’y sont pas. Tout au moins quatre ou cinq. Elle se défend mais il lui coupe la parole.

- Pour la peine, tu paieras les consommations.

Elle sursaute et se rétracte. Elle a peur et le lui dit.

Alors, il hausse les épaules. Ce n’est rien. Il plaisantait. Et puis, il est content de la voir et la trouve jolie. Pour son âge. Il le précise…

Elle essaie de lui parler et il l’écoute avec cette gravité qu’il conserve et qui lui donne, malgré sa mise simple, du poids et de l’autorité. La prise de contact se fait peu à peu. Elle sent ses regards sur elle et se dit qu’elle lui plait peut-être. Il a bien été question qu’elle le suive et lui obéisse au sortir du café s’il le jugeait bon. Que décidera-t’ il ?

Il questionne encore un peu puis finit par proposer qu’elle l’accompagne. Il n’habite pas très loin mais chacun doit prendre sa voiture. Est- elle d’accord ? Saisit-elle ce que cela signifie ?

Elle hoche la tête. Oui, « Irène comprend très bien ». Du reste, elle ne porte qu’une robe noire et des talons, son imperméable étant resté dans son véhicule. Elle est joliment maquillée et coiffée. Et prête. Elle a peur mais envie. Des contacts réels, elle n’a pourtant que des souvenirs violents mais depuis qu’elle dialogue sur le site spécialisé et en dehors, elle devine bien qu’il existe une autre façon d’être face à face. Alors oui, elle veut bien se rendre chez lui.

Ils marchent côte à côte un moment puis montent dans leurs voitures. Le reste est confus.

Il pleut, elle roule lentement, trop. Il l’attend, elle le suit puis le perd. Il l’attend encore. De nouveau, elle l’appelle et lui signifie qu’elle ne comprend où il l’emmène. Cette fois, il se fâche. Toute seule dans sa robe noire, elle s’arrête sur le bord de la route et pleure. Une dernière fois, il explique, escomptant qu’elle se reprendra. Ce qu’elle fait. Enfin, il la conduit là où il veut l’emmener remarquant son trouble sans déroger à son projet. Elle se gare devant chez lui, dans l’air frais du soir. Ils montent ensemble et elle reste en retrait quand il ouvre la porte de son appartement. Le décor sobre à l’ameublement simple et aux  murs nus la surprend. Aucun tableau, aucune photo. Pas la moindre allusion à ses gouts esthétiques et encore moins à son environnement familial et amical. C’est atypique. Il lui semble qu’elle est à l’hôtel. D’abord surprise, elle se glisse dans ce décor dont l’impersonnalité est peut-être un atout. Après tout, il a crée là, volontairement ou pas un lieu neutre propre à des scènes de domination. Rien à quoi se raccrocher : une image, un portrait, des fleurs, des éléments de décoration. Rien. Juste un lieu où faire ce pourquoi elle est venue. Alors, elle a moins peur. Il la scrute. Pour lui obéir, il faut décoder vite.

- Déshabille-toi, Irène.

Le rouge aux joues, elle retire robe et talons. Elle ne porte rien d’autre et, tandis qu’il  tourne autour d’elle pour l’inspecter, elle sent le rouge lui monter aux joues. Elle a toujours peur mais il la regarde d’une manière qui commence à la rassurer. Il veut la dominer et cherche ce qu’il va faire. Elle le laisse effleurer ses seins dont les pointes rétractées jaillissent soudain. Il palpe son ventre renflé, atteint son sexe qu’il ouvre pour en vérifier l’humidité et écarte les lobes de ses fesses en lui demandant de se cambrer. Alors, il se penche et observe l’orifice intime qu’elle avait encore dérobé.

Elle se tend tout entière vers lui qui modifie les positions de son corps.

Elle sait que pendant cette première séance, elle est ensuite assise les jambes écartées puis allongée sur le dos et le ventre. Elle sent ses doigts nerveux, entend sa voix, accepte les caresses plus ou moins douces, les palpations, les ordres successifs. Elle est à quatre pattes. Il entre des doigts dans ses délicats et tièdes conduits intimes qui sont visités d’une manière adroite et vindicative.

Elle s’humidifie beaucoup, se tient cuisses ouvertes, sent une main sur ses reins qui la forcent à se cambrer, lèche des doigts qui portent ses odeurs, sourit, se crispe puis sourit encore.

Il est XX, le dominant qui s’annonce et promet de mettre un terme à une vie fantasmatique délirante pour la remplacer par une autre aux épanchements et aux délires autour de lui organisés. C’est une chance même si, au terme de cette première séance, elle pleure violemment. Lui, si froid, s’approche, l’enlace, la rassure. Pourtant, elle l’a très mal servie. Mal caressé, mal sucé. Il a de quoi être mécontent. Elle s’étonne qu’il reste clément et fasse preuve quand il met fin à une première entrevue laborieuse où elle a maladroitement marché à quatre pattes, attendu, repris sa marche avant de s’immobiliser d’une douceur inattendue. Elle aurait dû savoir le contenter…

Il pose sur elle ses yeux bruns et elle s’étonne encore de ce visage plus adolescent que mâture.

- On continue de se parler ?

- Oui, sur internet.

- On se revoie ?

Il a un léger sourire :

- On se parle.

Elle hoche la tête. Ils se séparent. Elle rentre lentement en se remémorant les gestes précis qu’il a eus. Il faut qu’elle apprenne qu’il lui ouvre la chatte à deux doigts et palpe grandes et petites lèvres avec délectation avant d’aller œuvrer dans le conduit tiède que le travail qu’il lui imposera fera se dilater. Oui, elle doit retenir cela. De même, elle doit accepter que son anus soit visité avec insistance. Con et cul, doigts inquisiteurs…Car enfin, si elle s’est préparée comme convenu, elle pourra, en diverses positions, contenter le Maitre qui demande satisfaction sexuelle à la femme qu’il soumet.

Et, de fait, XX la prépare à ses entrées.

Elle le sait mais estimant avoir mal réussi, elle est tout à la fois honteuse et radieuse quand elle rejoint l’hôtel où tout à l’heure elle s’est si minutieusement préparée. Elle pleure puis s’apaise et se caresse. Elle jouit rapidement. Avec lui, elle n’y est parvenue et se mal à l’aise quand un orgasme d’une violence inattendue la submerge. Ensuite, elle somnole, pensant à lui puis dort. Au matin, elle sait qu’elle n’a pas fait une rencontre fortuite. Certes, elle a peu connu la domination concrète mais ce retour au réel après des expériences dures est salvateur. C’est à lui qu’elle le doit, lui, le jeune homme têtu et plein d’idées…

Il ne lui a pas semblé qu’il resterait sans contact avec elle.

Au matin, Irène sourit et boit un café serré avant de nager longuement dans la piscine de l’hôtel. Elle est ravie, oubliant l’âpreté de certains moments. Rentrant ensuite chez elle, elle constate qu’il ne l’a pas saluée et en conçoit du dépit. Quelques jours plus tard, cependant, il réapparaît, laissant messages et instructions, remerciant et attendant. Elle répond vite, tâchant de lui plaire. Elle escompte comme lui que, la première entrevue ayant été délicate, les prochaines seront mieux réussies. Il en est de même pour lui, le constate t’elle puisqu’au bout d’une période assez silencieuse, il pose un second rendez-vous.

A cette annonce, Irène sent son corps se raidir, ses seins devenir durs et ses parties intimes sont à la fois plus dilatées et plus odorantes. Son intellect et son émotivité réagissent aussi car il envoie un règlement en dix points qu’elle devra, au moment où elle l’approchera, connaître par cœur. Le recevant, elle en découvre avec surprise la teneur. Seul le dixième point est aléatoire. Les autres ne souffriront aucun contrordre.

Bien. Irène apprend son étrange leçon.

Article 1 : devant ton Maître, toujours nue tu seras.

Article 2 : par tes phrases, « Monsieur » tu finiras.

Article 3 : pour parler, le doigt tu lèveras.

Article 4 : à quatre pattes, pour ton Maître, tu te déplaceras.

Article 5 : toujours, les yeux baissés devant ton Maître, tu auras.

Article 6 : Chienne toujours tu seras.

Article 7 : Un collier, pour ton Maître, tu porteras.

Article 8 : Avec ton Maitre, aucun interdit tu n’auras.

Article 9 : En public, ton Maitre ignorera.

Article 10 : offerte à d’autres, tu seras, quand ton Maître le voudra.

Le dernier article est présenté comme optionnel. Il ne saurait, en effet, être mis en application d’emblée.

XX téléphone plusieurs fois et demande si elle est à même de réciter en bonne élève méritante. Elle se trompe un peu et se fait reprendre. Le jeune homme sévère la morigène tout en la questionnant sur ses pratiques sexuelles solitaires qu’il commence à réglementer. Il est bon qu’elle se masturbe à condition qu’il le sache et soit respectueuse d’un échéancier qu’il donne. Elle ne peut jouir comme elle veut. Il autorisera ou non. Quant au collier, aux pièces de lingerie et aux jouets sexuels qui seront inhérentes à leurs jeux, il coule de source qu’elle doit en assumer l’achat. Sans parler des objets punitifs…

Irène tremble, apprend sa leçon et guette le rendez-vous prochain. Enfin, il pose une date. Elle est d’accord.

Avant de prendre une autre fois la route du sud, elle passe un cap. Dans sa baignoire, assise, cuisses écartées, elle se rase méthodiquement la chatte. Le rasoir, à cause de la mousse savonneuse, trace sur sa peau de délicats chemins sans qu’elle ressente la moindre douleur. Le travail est long, un peu fastidieux. Elle tente de le parfaire dans sa chambre, où, allongée, un miroir placé entre ses jambes, elle attend les zones délicates de ses petites lèvres où  subsiste une pilosité inamicale. Elle sursaute quand elle se coupe un peu et interrompt son labeur. Elle le reprend tout de même les jours qui précèdent, soucieuse d’offrir à XX cette chair nue, douce et vulnérable, cette fente redevenue enfantine et cette suavité.

Le jour arrive. Elle est prête. Elle roule.

Elle sait son texte, elle a les objets et sous ses vêtements, elle est nue.